Ministre du culte : avis du Conseil d’Etat

Dans la cadre du projet de loi portant des dispositions diverses (I) 52/1200, la section législation du Conseil d’Etat a rendu un avis n°44351, dans lequel on peut notamment lire : « (…) En conséquence de la liberté d’organisation interne, c’est aux cultes et aux organisations philosophiques non confessionnelles de désigner ceux qu’ils considèrent comme « ministres du culte » ou comme « délégués » (88). Comme l’a rappelé le Conseil d’État à propos des communautés philosophiques non confessionnelles reconnues — mais le principe vaut également pour les cultes reconnus : « L’État doit donc limiter son intervention à la fixation des seuils de rémunération en tenant compte des responsabilités respectives assumées par les délégués, celles ci ayant été, au préalable, définies par le Conseil central laïque. » 2. Dès lors, d’une part, que les assistants paroissiaux se rattachent à un culte reconnu (ils remplissent, dans l’Église catholique, un office ecclésiastique dont le statut est fixé au niveau diocésain) et que, d’autre part, l’Église les considère comme « ministres du culte », il appartient au législateur des les prendre en considération. L’extinction effective du cadre des assistants paroissiaux constituerait une violation de l’article 181, § 1er, combiné avec les articles 19, 21 et 27 de la Constitution. La manière la plus adéquate de prendre en considération les assistants paroissiaux consisterait, semble-t-il, à les intégrer dans la liste de l’article 26 de la loi du 2 août 1974, précitée. Le législateur pourrait, à cette occasion, pour tous les cultes, actualiser les fonctions reprises dans la loi qui ne correspondent plus entièrement à la réalité. » (citations omises).

Dossier en cours depuis 2004 : un test pour le régime belge des cultes reconnus…



Nullité de mariage civil et religion

Un jugement du Tribunal de Grande Instance de Lille, du 1er avril 2008, soulève en France une vive polémique (blog de Me Eolas ; wikipedia.fr) l’absence de virginité a pu conduire à invalider un mariage civil à la demande d’un mari en l’occurence musulman, en application de l’article 180 du Code civil français.


Article 180
Modifié par Loi n°2006-399 du 4 avril 2006 – art. 5 () JORF 5 avril 2006 : « Le mariage qui a été contracté sans le consentement libre des deux époux, ou de l’un d’eux, ne peut être attaqué que par les époux, ou par celui des deux dont le consentement n’a pas été libre, ou par le ministère public. L’exercice d’une contrainte sur les époux ou l’un d’eux, y compris par crainte révérencielle envers un ascendant, constitue un cas de nullité du mariage. S’il y a eu erreur dans la personne, ou sur des qualités essentielles de la personne, l’autre époux peut demander la nullité du mariage ».

Extrait de la décision : « il importe de rappeler que l’erreur sur les qualités essentielles du conjoint [art. 180 du Code civil français] suppose non seulement de démontrer que le demandeur a conclu le mariage sous l’empire d’une erreur objective, mais également qu’une telle erreur était déterminante de son consentement ; Attendu qu’en l’occurrence, Y… acquiesçant à la demande de nullité fondée sur un mensonge relatif à sa virginité, il s’en déduit que cette qualité avait bien été perçue par elle comme une qualité essentielle déterminante du consentement de X… au mariage projeté ; que dans ces conditions, il convient de faire droit à la demande de nullité du mariage pour erreur sur les qualités essentielles du conjoint ».

Pour ce qui est du droit français, la notion d » erreur sur une qualité essentielle » relève d’une interprétation par les particuliers eux-mêmes, dans les limites d’un sens commun lui-même conçu comme ouvert à une certaine diversité sociale ?  Loin d’être paternaliste, ce texte français de 1975 fut en son temps une consécration nouvelle de l’individualisme. Comment toutefois mesurer les limites acceptables de ce qui peut être considéré par les uns ou les autres comme « essentiel » au mariage ? Les auteurs, comme Carbonnier, avait d’emblée annoncer la difficulté. L’ignorance d’une relation antérieure, non (clairement) rompue, a pu être considérée comme un cas d’erreur recevable. L’existence d’un mariage religieux antérieur, encore valide selon les normes religieuses, a pu également être pris en considération par les Cours et tribunaux de la République. Il reste que la jurisprudence française semble particulièrement attentive aux qualités qui produisent des effets concrets sur la vie matrimoniale projetée (comme par exemple, l’absence de certaines maladies contagieuses, l’absence de stérilité etc). Il serait cependant regrettable que les bornes du sens commun, retenues comme limites aux excès de qualifications individuelles, en viennent à ne plus laisser de marge au pluralisme social et à une certaine diversité des conceptions matrimoniales. La polémique est donc très paradoxale : il s’agirait de renverser le cours de l’histoire récente du droit matrimonial et de renforcer la définition substantielle du mariage, que les législateurs n’avaient de cesse de vider progressivement jusque là.

La conjonction entre une conviction religieuse et une qualité essentielle n’est en tout cas jamais reçue comme telle selon la jurisprudence française classique, mais seulement par le biais de qualités déterminantes et non manifestement contraire à un ordre public du sens commun.

Mais sans aller plus loin, ce qu’il importe de signaler ici, c’est tout simplement que l’article 180, al. 2 du Code civil français n’a pas d’équivalent en Belgique. Le Code civil belge ne permet pas d’annuler un mariage civil pour erreur sur les qualités essentielles du conjoint et reste toujours attaché à l’adage moyen-âgeux : « En mariage, trompe qui peut ». Une chance ?



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