Islam et financement au GD Luxembourg

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Il y a quelques jours, la presse luxembourgeoise révélait que l’islam est désormais la seconde religion au Grand-Duché de Luxembourg. Plusieurs années auparavant, l’European Values Study de 2009 signalait déjà une forte progression de la présence de personnes de confession musulmane, avec un passage de 0,7 % en 1999 à 2 % de la population en 2008. Actuellement, sur sa population totale – qui se situe aux alentours de 550.000 personnes –, le Grand-Duché compterait 18.000 musulmans, soit un peu plus de 3,2 % de la population.

Au-delà de l’évolution sociologique dont ils témoignent, ces chiffres sont particulièrement intéressants lorsqu’ils sont lus de façon combinée avec la récente réforme du système de financement public des cultes mis en place depuis début 2015 par le Luxembourg.

Comme la Belgique, le Grand-Duché a longtemps été un Etat largement dominé par le culte catholique. Initialement, l’Etat luxembourgeois finançait les cultes avec lesquels il a signé une convention de façon assez semblable au système applicable en Belgique, où sont seuls financés les cultes ayant été reconnus par le législateur fédéral. Au rang des ressemblances les caractérisant, l’on pointera notamment l’article 181 de la Constitution belge qui dispose que « les traitements et pensions des ministres des cultes sont à la charge de l’Etat; les sommes nécessaires pour y faire face sont annuellement portées au budget » et l’article 106 de la Constitution luxembourgeoise qui énonce que « les traitements et pensions des ministres des cultes sont à charge de l’Etat et réglés par la loi ».

Le nouveau système adopté par le Grand-Duché de Luxembourg début 2015 maintient le financement étatique, mais sous la forme d’une enveloppe globale annuelle qui sera reçue par chaque culte reconnu et divisée en son sein. A cet égard, il est intéressant de noter que jusqu’en janvier 2015, seuls les cultes catholique, protestant, israélite, anglican et orthodoxe bénéficiaient du financement étatique. Puis, le 26 janvier 2015, concomitamment à l’adoption du nouveau mode de financement public des cultes, une convention a été signée avec le culte islamique afin que ce dernier jouisse désormais également du financement public.

Cette nouvelle reconnaissance du culte islamique au Grand-Duché de Luxembourg, couplée aux récents chiffres publiés concernant l’augmentation de la population musulmane, constitue l’une des nombreuses illustrations du lien inextricable entre le facteur sociologique, politique et juridique dans l’appréhension du phénomène religieux. Dans la même veine, l’on se souviendra de l’impact de l’immigration marocaine et turque dans les années soixante en Belgique, et de la signature de la convention belgo-marocaine du 17 février 1964 relative à l’occupation de travailleurs marocains en Belgique et de l’accord belgo-turc du 16 juillet 1964 relatif à l’occupation des travailleurs turcs en Belgique, sur la reconnaissance du culte islamique intervenue à l’occasion de l’adoption de la loi 19 juillet 1974.

Par ailleurs, l’on peut se demander si la récente modification du système de financement public des cultes intervenue au Grand-Duché de Luxembourg ne constitue pas, en toile de fond, l’occasion pour la Belgique de s’en inspirer, en se penchant à son tour sur la réforme de son propre système de financement. Malgré les rapports rendus respectivement en 2006 et en 2011, à la demande du Ministre de la Justice, par la Commission « chargée de l’examen du statut des ministres des cultes reconnus » – dite « Commission des Sages » – et le Groupe de travail « chargé de la réforme de la législation sur les cultes et les organisations philosophiques non confessionnelles », l’on peut regretter que cette réforme ne semble, pour l’instant, pas constituer une priorité pour le Gouvernement belge.

Stéphanie Wattier

Docteur en sciences juridiques de l’UCL
Aspirante du F.R.S.-FNRS

Loi du 13 décembre 1976 portant approbation des accords bilatéraux relatifs à l’emploi en Belgique de travailleurs étrangers, M.B., 17 juin 1977. Cette loi porte, entre autres, approbation à la convention entre la Belgique et le Maroc relative à l’occupation des travailleurs marocains en Belgique, signée à Bruxelles le 17 février 1964.



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