Le ‘burkini’ en piscine 15 juillet
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Le Centre pour l’égalité des chances (UNIA) vient de rendre public le 13 juillet 2017 un avis concernant le port du maillot de bain couvrant le corps (combinaison intégrale) dans une piscine publique. Un an après les polémiques françaises et l’arrêt du Conseil d’Etat de France qui a annulé les interdictions de tels vêtements sur les plages françaises, l’autorité anti-discrimination belge confirme que même en piscine publique une telle interdiction doit être considérée comme discriminatoire.
Voici le résumé de cet avis, tel que diffusé par UNIA :
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« Peut-on interdire le port du maillot de bain couvrant le corps (combinaison intégrale) dans une piscine publique ? Cette question a été posée à Unia par quelques villes et communes flamandes, dont Louvain et Gand, et par plusieurs nageuses. Pour y répondre, Unia a interrogé l’Agence Soins et Santé en Flandre (Vlaams Agentschap Zorg en Gezondheid) et de la Genderkamer flamande*. Sur la base de leurs arguments, Unia ne voit aucune raison valable de restreindre la liberté de choisir une combinaison de bain intégrale (autrement appelée burkini). Unia en déduit qu’en l’absence de fondement juridique, cette interdiction est contraire au décret anti-discrimination flamand.
Certaines piscines publiques interdisent ce type de tenue. Les arguments invoqués par les exploitants ont souvent trait à l’hygiène et la sécurité. Unia a entendu d’autres arguments en faveur d’une interdiction : le maillot de bain couvrant le corps mettrait en péril l’égalité entre hommes et femmes et certains nageurs se sentiraient moins à l’aise et y réagiraient négativement.
Jusqu’à présent, les seuls cas dont Unia a été saisi concernaient des piscines publiques en Flandre, et donc la législation antidiscrimination flamande, raison pour laquelle, seule des autorités flamandes ont été consultées.
Liberté individuelle
La Belgique est un pays libre dans lequel on peut, en règle générale, penser et dire ce qu’on veut (liberté d’expression) et croire ce qu’on veut (liberté de religion et de conviction). Cette liberté s’étend aux vêtements que l’on porte. Un pouvoir public qui voudrait la restreindre doit avancer de solides arguments tels que la protection de l’intérêt général, la protection des droits d’autrui, etc.
Unia a dès lors présenté les arguments retenus à des instances spécialisées. Elles estiment que les arguments ne peuvent pas justifier une interdiction du maillot de bain couvrant le corps.
Raisons d’hygiène et de sécurité ?
D’après l’Agence Soins et Santé en Flandre (Vlaams Agentschap Zorg en Gezondheid), une interdiction pour raisons d’hygiène n’est pas envisageable. Le maillot de bain couvrant l’entièreté du corps est de la même matière que les autres maillots de bain et n’a donc aucun impact sur la qualité de l’eau. Au niveau de la sécurité, l’Agence ne voit pas non plus de risques.
Égalité homme/femme ?
La Genderkamer flamande est formelle : ce type de tenue ne représente pas un danger pour l’égalité entre hommes et femmes. D’après elle, on ne peut pas dire d’un vêtement porté volontairement qu’il constitue une atteinte à l’égalité entre hommes et femmes. L’argument de l’égalité ne peut donc pas être utilisé pour s’opposer à un vêtement de ce type. Le fait que le vêtement soit perçu par certains comme trop peu conventionnel ou trop prude, voire comme étrange, ne suffit pas à justifier une interdiction.
Réactions négatives d’autres nageurs
Unia fait en outre valoir que les réactions négatives d’autres baigneurs ne constituent pas un argument juridique pour justifier une interdiction.
Conclusion
Compte tenu des arguments ci-dessus, Unia conclut qu’une interdiction générale du port du maillot de bain couvrant le corps peut être discriminante pour certains nageurs. Il s’agit plus spécifiquement ici de personnes qui veulent le porter par conviction ou par nécessité, en raison notamment de leur état santé, d’une caractéristique physique ou d’un handicap.
En tant qu’institution de défense des droits de l’Homme, Unia soutient avec force la liberté individuelle. Quoi qu’on puisse en penser, un maillot de bain couvrant le corps peut être porté pour des raisons religieuses. Il s’agit également d’une liberté fondamentale telle que décrite dans la constitution et dans les traités internationaux de défense des droits de l’Homme.
La loi
Le décret flamand anti-discrimination interdit toute discrimination fondée sur 19 caractéristiques personnelles protégées telles que les convictions religieuses ou philosophiques, le handicap, l’état de santé et les caractéristiques physiques.
Un traitement différent dans le droit anti-discrimination n’est cependant pas considéré comme une discrimination s’il est démontré que ce traitement différent est dicté par un but légitime et si les moyens employés pour atteindre ce but dans un cas concret sont appropriés (c’est-à-dire qu’ils permettent la réalisation de l’objectif) et nécessaires (l’objectif ne peut pas être atteint autrement). En d’autres termes, ces moyens doivent être « proportionnés ».
Accord de coopération
Par cet avis, Unia accomplit les tâches qui lui sont assignées par l’accord de coopération. Il s’agit d’un accord entre les autorités fédérales, les régions et les communautés qui mandate notamment Unia pour formuler des recommandations et des avis indépendants, de manière proactive ou en réponse à une demande. » (Unia)
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Voir l’avis complet (en néerlandais) sur le site d’Unia.
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Dans la littérature récente, OJUREL conseille la lecture de :
- ABDELAAL, Mohamed, « Extreme Secularism vs. Religious Radicalism: The Case of the French Burkini » (June 24, 2017). 23 ILSA Journal of International & Comparative Law (2017). Available at SSRN: https://ssrn.com/abstract=2992013
- KALANTRY, S., « The French Veil Ban: A Transnational Legal Feminist Approach », University of Baltimore Law Review, Vol. 46, Issue 2 (Spring 2017), pp. 201-236.
- SCHLEGEL, J.L.,, « Le burkini affole la laïcité française », Esprit 2016/10 (Octobre), p. 7-10.
- WATTIER, S., « Le Conseil d’État français suspend l’interdiction du port du « burkini » (obs. sous C.E. (fr.), ordonnance Ligue des droits de l’homme e.a., 26 août 2016) », Rev. trim. D.H. 2017, liv. 110, 407-419